Dans un paysage en constante évolution, la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) est devenue un sujet majeur, catalysant des changements profonds dans la manière dont les entreprises abordent la durabilité et la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). À travers son expérience et son expertise, Olivier de Montety, Directeur Associé de X-PM nous offre un éclairage précieux sur ce sujet d’actualité : la révolution du rôle du Directeur du Développement Durable, passant de la simple responsabilité à une intégration stratégique au cœur des entreprises.
La fonction RSE existe parfois depuis près de 30 ans dans certaines entreprises, mais elle semblait se chercher un chemin entre effets d’annonce, velléités et actions concrètes.
La RSE est historiquement définie par les trois critères ESG (Environnement, Sociétal et Gouvernance). L’Environnement, autrefois considéré comme un sujet secondaire en raison de sa complexité à être mesuré, aux critères flous et souvent utilisé à des fins de communication, est désormais révolu.
Longtemps perçue comme une annexe de la Communication ou des Ressources Humaines, la RSE gagne aujourd’hui en clarté et en importance, s’imposant comme une pierre angulaire dans l’architecture stratégique des entreprises.
Le défi du reporting : de la NFRD à la CSRD
La Directive sur le Reporting Non Financier (NFRD) a initié, en 2014, le mouvement vers un reporting plus structuré mais c’est bien la CSRD, entrée en vigueur en janvier 2024, qui va transformer véritablement le paysage. Cette évolution législative trouve ses racines dans une volonté d’accroître la mesure, la transparence et la responsabilité des entreprises.
Sous la NFRD, le reporting se caractérisait par des informations disparates et peu comparables, rendant difficile l’évaluation de l’impact réel des organisations sur leur environnement. La NFRD, bien qu’allant dans la bonne direction, s’est donc avérée insuffisante pour répondre aux attentes des parties prenantes en matière de durabilité.
Avec la CSRD, les entreprises sont désormais tenues de suivre des normes précises et harmonisées, développées par l’EFRAG pour la Commission Européenne. Cette évolution vers des critères plus rigoureux permettra une évaluation et une comparaison fiables des performances environnementales et sociétales à la fois d’une entreprise sur plusieurs années ou des entreprises entre-elles, marquant une avancée significative dans la transparence et l’efficacité du reporting de durabilité.
Transformation et transversalité : le nouveau visage du Directeur du Développement Durable
L’évolution vers la CSRD a propulsé le Directeur du Développement Durable dans un rôle transversal inédit, le positionnant comme un acteur stratégique auprès de multiples départements comme la finance, les RH, la logistique et la production.
Cette transversalité nécessite en effet une collaboration étroite avec ces diverses fonctions pour intégrer efficacement les critères ESG.
Le Directeur du Développement Durable (DDD) devient un pivot, collectant l’information, facilitant l’adoption de pratiques durables à travers l’organisation et renforçant ainsi son rôle dans la stratégie d’entreprise et l’atteinte des objectifs de durabilité.
Le DDD en tant que Program Manager : pilotage stratégique et cohérence
La complexité et l’étendue des exigences de la CSRD transforment le DDD en un Directeur de programme/PMO, chargé de coordonner les efforts pour construire un système de collecte et traitement homogène de données, assurant l’intégrité et la fiabilité des informations rapportées.
Cette responsabilité implique de naviguer à travers plus de 1200 points de mesure potentiels, sélectionnant ceux qui sont les plus pertinents pour l’entreprise. Le DDD doit ainsi établir un système d’information robuste et spécifique pour gérer cette complexité, assurant l’intégrité et la fiabilité des informations rapportées, tout en fournissant des outils de décision éclairés aux managers.
L’émergence du Directeur du Développement Durable stratège
La CSRD pousse les entreprises à réfléchir profondément sur leur stratégie et leur business model.
Face à ses parties prenantes, l’entreprise ne peut plus ignorer les externalités négatives. Elles sont désormais mesurées, compilées, et souvent publiques ou partagées. Au-delà de la simple conformité à une nouvelle réglementation de l’UE, la profondeur de ce rapport pousse donc à une réflexion de fonds sur la stratégie et le business model de l’entreprise.
Il serait donc erroné de voir dans la CSRD un simple exercice de reporting supplémentaire.
Le DDD devient crucial pour guider le Comité de Direction et le Board dans l’élaboration d’une stratégie alignée sur les enjeux du développement durable. Il doit anticiper les risques et répondre aux attentes des parties prenantes.
Elle représente une opportunité cruciale pour les entreprises de réaligner leurs stratégies avec les principes du développement durable, anticipant mieux les risques, développant la résilience, et répondant plus efficacement aux attentes des parties prenantes.
Les mutations induites par la CSRD redéfinissent non seulement le rôle mais aussi l’impact du Directeur du Développement Durable, marquant le début d’une nouvelle ère permettant, nous l’espérons, un avenir plus serein pour les générations futures.